La question du temps passé au travail occupe l’esprit d’experts et syndicats depuis le siècle dernier, où l’apparition de la semaine de cinq jours et des congés payés a déclenché une première révolution dans le monde du travail. Mais la société a bien changé depuis, notamment avec les progrès technologiques et l’arrivée de nombreuses femmes sur le marché du travail, comme le souligne le professeur Tony Dobbins, spécialisé dans le management et les relations au travail à l’université de Birmingham. Un nouveau modèle intéresse donc les experts : celui de la semaine de quatre jours.
L’idée est de réduire le temps passé au travail tout en conservant les mêmes objectifs et le même salaire. Cette approche aurait pour bénéfices d’améliorer le bien-être des employés, tout en réduisant certaines charges financières liées à l’emploi, comme les transports et la garde d’enfants.
Du côté des entreprises, la semaine de quatre jours présenterait des avantages économiques au niveau de la productivité et des performances de leurs employés.
Séduits par l’idée, plusieurs spécialistes et organisations de recherche, comme The Autonomy Institute et la 4 Day Week Foundation, ont lancé un test de six mois au Royaume-Uni en 2022 avec une soixantaine d’entreprises comptabilisant environ 3,000 employés.
Trois ans plus tard, force est de constater que ce projet pilote a été un véritable succès ! « Il y a eu un taux de succès de 92% après les six mois de pilote, et 56 de ces organisations ont décidé de garder la semaine de quatre jours, soit sous la forme d’une extension du pilote, soit en l’adoptant de façon permanente », explique Tatiana Pignon.
La directrice associée à The Autonomy Institute rappelle aussi que l’objectif est avant tout de réduire « entre 10 et 20% du temps de travail actuel sans perte de salaire ». Et il semble avoir porté ses fruits sur le long terme pour « 89% des entreprises » du test, qui ont continué à proposer ce modèle un an après.
L’un des facteurs de ce succès résiderait dans la diversité des approches choisies par les entreprises pour mettre en place une réduction du temps de travail. « Par exemple, un (restaurant de) Fish & Chips ayant participé à ce pilote a opté pour une annualisation du temps du travail, qui peut être très utile dans certains secteurs avec des périodes de pics d’activité », note Tatiana Pignon. « D’autres, comme Citizens Advice Gateshead, ont profité de ce test pour allonger leurs horaires d’ouverture tout en réduisant et réorganisant le temps de travail de leurs salariés sur la semaine ».
Une question subsiste toutefois sur la semaine de quatre jours : est-elle possible pour toutes les professions ? Selon Autonomy, la réponse est oui, même si certains secteurs seront certainement amenés à consacrer plus de temps à étudier les possibilités et conditions de développement du modèle en fonction des objectifs et contraintes opérationnels des employés. « Il est très important dès le début d’avoir une clarté sur les raisons, les objectifs et les lignes rouges – sur ce qui est possible ou pas », explique Tatiana Pignon.
Le déroulement de ce modèle se poursuit et a même été adopté sur le long terme par deux cents entreprises britanniques, selon un communiqué de la 4 Day Week Foundation datant de janvier 2025.
Mais pour le professeur Tony Dobbins, le soutien du gouvernement aiderait la semaine de quatre jours à se développer au sens large du fait que « les employeurs ont encore beaucoup de libertés ».